BoBo = Bourgeois Bohême. Individu appartenant à la classe moyenne haute, mais sympathisant avec les codes et modes de vie des bohémiens et autres révolutionnaires se battant contre l'ordre établi à plusieurs niveaux. En gros, un mec qui a eu la chance de grandir à l'abri du besoin, dans un joli pavillon paisible, issu d'une famille de cadres, qui a les moyens de s'acheter le dernier iMac quand il sort, mais qui soutient les idéaux défendus par Che Guevara, Mai 68, cite à profusion les poètes maudits et manifeste contre l'expulsion de sans papiers en arborant un chandail JPG (le couturier excentrique, pas le format de compression d'images...), avant d'aller refaire le monde à la terrasse du Flore (si dans votre esprit vous vous demandez: "le Flore?..." vous n'êtes pas BoBo, vous voilà rassurés...).
Notez que je n'ai strictement rien contre les BoBos, je me soupçonne d'ailleurs fortement d'en être un par moments*! Ce que je voudrais c'est comprendre. Comme d'hab. Comprendre ce déni des "valeurs" de sa classe, sans pour autant renoncer aux privilèges; comprendre ce qui peut faire qu'on se mette dans la situation paradoxale de profiter des avantages de la bourgeoisie tout en mettant à mal, par le idées qu'on défend, le maintien de ceux-ci. Comme Frédéric Beigbeder qui a été (grassement rémunéré pour être) le responsable de la communication et image de Robert Hue, candidat communiste, pendant les présidentielles de 2002, alors qu'il est issu d'un milieu à mille lieues** de l'Internationale (Papa chasseur de têtes, grand frère homme d'affaires parmi les plus côtés de l'héxagone, lui... ÉCRIVAIN! La brebis galeuse, le bohémien, le paresseux, quoi...).
Le BoBo est-il un bourgeois immature en pleine crise d'adolescence? Se doit-il de passer par là, de se rebeller avant de devenir ce qu'il est, comme le dit si bien le slogan légendaire de la marque Lacoste?
Commençons par identifier le BoBo. Nous avons dressé son portrait socio-professionnel, décodé son génome, en quelque sorte... Mais est-il repérable "à l'oeil nu", comme ça, dans la rue?
Le BoBo est difficile à repérer pour l'oeil non averti. Ceci dit, une fois qu'on a en main les clés pour décoder, ça semble clair et limpide comme de l'eau de roche. Le BoBo aime se camoufler en "gent du peuple". Le BoBo va arborer un look négligé savamment étudié, poussant à l'extrême le mimétisme avec ceux qu'il admire. Il va porter la barbe de 15 jours, dont la longueur de poil sera minutieusement entretenue au quotidien, il va porter des vêtements qui, au premier abord, ne vont pas différer de beaucoup de ceux de la classe ouvrière, à quelques "détails" près. Son pull asymétrique diforme aura une petite étiquette Hermès, ses baskets de baroudeur seront signées Hugo Boss, son col roulé sous sa veste à coudières renforcées sera un Bompard de bonne facture, sa sacoche en véritable cuir de vachette proviendra des usines Calvin Klein, son keffieh portera un discret logo LV... Parce que, quand même, ce n'est pas parce qu'on imite les pauvres qu'on doit aussi en imiter l'inconfort! Le BoBo (tel Johnny Depp, un des spécimens les plus représentatifs) est donc attiffé comme un clochard, mais avec des fringues de prince! Cette allure doit trancher avec le costume trois pièces gris en semaine, polo Ralph Lauren et chaussures de voile le weekend, qu'on est en droit d'attendre de lui. Le BoBo voit dans son choix de vie une porte vers la liberté, un répit, une façon de repousser l'échéance fatale...
Oui, le BoBo a des responsabilités sociales que tôt ou tard il sera appelé à assumer, et IL NE LE VEUT PAS! Il le faudra pourtant, la survie de sa CSP+ en dépend grandement, mais il ne saurait s'y résoudre. Renoncer à la liberté de refaire lee monde sans commencer par changer sa vie en premier lieu, renoncer aux soirées de bohême dans le 10ème ou le 20ème arrondissement, là où vivent les "vrais gens" (sous entendu: "nous, les bourgeois, n'en sommes pas"), avec de vrais problèmes, le sel de la terre tandis que nous n'en sommes que le caviar... Cette recherche est, avant toute chose, une recherche de sa propre Humanité, une façon de demander pardon pour ce que leurs parents ont fait aux moins fortunés, et surtout de ce qu'ils s'apprêtent à faire à leur tour...
Être BoBo, c'est s'acheter une forme de bonne conscience, c'est demander pardon pour n'avoir pas eu à galérer, pardon parce qu'il s'identifie à "l'autre" gamin, le bien né, dans la chanson "Nés Sous La Même Étoile" d'IAM... Être BoBo, c'est avoir conscience que l'on va reproduire, tôt ou tard le schéma de ses parents... Mais le BoBo n'a pas l'excuse de dire qu'il ne "savait pas"...
Donc, pour en revenir au titre de cet article, il n'y a pas de formule miracle pour assumer son BoBo-isme. D'ailleurs, aussi incroyable que cela puisse paraître, beaucoup de BoBos, passée la période de culpabilité judéo-chrétienne, assument de façon décomplexée leur côté gauche caviar, je veux bien abollir les privilèges mais pas les miens. C'est aussi cela, la beauté de l'être humain: sa grande capacité de s'adapter à TOUT...
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*mon cas de figure est assez atypique, et ne rentre pas stricto sensu dans ce moule, ni dans aucun moule d'ailleurs... je suis un OutKast, même au sein de ma propre famille!
** je ne résiste pas à la tentation de faire remarquer l'allitération tautogrammatique du plus bel effet: "un milieu à mille lieues"! je me kiffe quand j'écris des choses comme ça tout à fait par hasard!
1 comment:
Oui, probablement il est donc
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