Tuesday, December 12, 2006

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Avec l'objectif atteint d'un Afghanistan perclus de bombardements et apparemment pacifié, nous voyons l'Amérique ériger, une fois de plus, l'Iraq en "démon-du-moment". Le dernier prétexte en date pour faire de l'Iraq une cible des médias et de l'appareil militaire, est que ce pays possède des "armes de destruction massive".Mais quel pays n'en possède pas ? L'ancien président, Bill Clinton, avait déjà joué la carte de l'Iraq quand il avait accusé le gouvernement de Bagdad d'être le seul à utiliser des armes de destruction massive même si l'Iraq n'était pas le seul pays à en posséder. L'éminent historien, Howard Zinn, auteur de l'ouvrage incontournable Histoire des Etats-Unis vue par ses peuples, a déclaré que seule une nation qui tourne le dos à son Histoire serait capable d'accepter l'argumentation de Clinton : "il ne peut soutenir ces contrevérités qu'auprès d'une population spoliée de son histoire. Les Etats-Unis ont équipé la Turquie, l'Israël et l'Indonésie avec de telles armes et ces pays les ont utilisées contre leurs populations civiles. La nation la plus coupable est bien la nôtre. Aucune nation sur la planète ne possède autant d'armes de destruction massive et aucune nation ne les a utilisées plus souvent que nous - avec des pertes en vies civiles plus importantes. A Hiroshima, des centaines de milliers sont morts, en Corée et au sud Vietnam des millions sont morts à cause de notre utilisation de telles armes."L'audacité de l'hypocrisie exhibée par une nation comme la nôtre, capable d'accabler de menaces une autre nation sous prétexte qu'elle possède des "armes de destruction massive", est sidérante. Les peuples asiatiques et arabes ne doivent pas en croire leurs oreilles. Le dérapage de Clinton vers la droite pendant son deuxième mandat est aujourd'hui reproduit par Bush fils, lequel recycle le mensonge de son prédécesseur : ce bon vieux mythe des "armes de destruction massive". C'est là également l'occasion pour Bush Jr., de réparer l'échec de Bush père dans la mesure où celui-ci avait omis de discipliner, comme il se devait, l'Iraq parce que cette nation avait osé se conduire en Etat souverain et non en Etat vassal (ou Etat-client) inféodé à l'Empire Américain. Pour pousser plus loin encore cette hypocrisie, sachez que certaines des armes détenues par l'Iraq étaient en effet des armes de destruction massive, ce que Washington ne pouvait ignorer puisque ce sont des équipements militaires américains qui furent livrés aux Iraqiens pour mieux leur permettre de tuer leurs adversaires iraniens. Les Etats-Unis, la Grande Bretagne et d'autres puissances occidentales se sont considérablement enrichis en vendant de telles armes non seulement à l'Iraq mais aussi à l'Iran. Les deux adversaires ont utilisé ces armes avec une efficacité redoutable au cours d'une guerre qui dura huit ans et provoqua la mort de 800.000 personnes - peut-être même I million de femmes, hommes et enfants.Courroucés par l'expulsion du Shah et la montée du feu ayatollah Khomeyni, les Etats-Unis se sont frotté les mains avec une joie toute mercantile tandis qu'ils armaient et poussaient au combat les Iraqiens tout proches. Les alliés d'hier sont les adversaires de demain. Et ce demain est arrivé : la poussière des bombardements répétés a à peine eu le temps de se mêler à la dure et froide terre afghane que l'Amérique cherche à étendre la série de ses Nouvelles Croisades à l'Iraq. Alors que l'Iraq a subi dix ans de bombardements ininterrompus aux mains des puissances occidentales ; alors que ce pays ne s'est pas encore relevé de pertes civiles s'élevant à près de 500.000 morts ; alors que l'Iraq est devenu un grand dépotoir de déchets toxiques à force de bombardements chimiques.En 1991, en 1993, en 1998 et aujourd'hui même, les menaces, le harcèlement et le bombardement de l'Iraq n'ont strictement rien à voir avec cette affaire d'armes de destruction massive.Pourquoi l'Iraq est-il un bouc émissaire de choix aujourd'hui ? Le brigadier général américain, William Looney, qui dirigea le bombardement de l'Iraq à la fin des années 1990, l'a dit sans ambages : "s'ils utilisent leurs radars, nous allons faire exploser leurs satanés missiles sol-air. Ils savent que nous possédons leur pays. Nous possédons leur espace aérien ... Nous dictons la façon dont ils vivent et s'expriment. C'est pour ça que l'Amérique d'aujourd'hui est formidable. Tout ça est bon, surtout qu'il y a beaucoup de pétrole là-bas et nous en avons besoin." (Wm Blum, Rogue State, Common Courage, 2000, p. 159).Voilà. Nous y sommes : le pétrole.Ne s'agit-il pas là d'un crime en violation de la législation internationale ?

MUMIA ABU-JAMAL

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