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Wednesday, June 10, 2009

De la Longévité en Amour...


On chante toujours les mêmes phases de l'amour. Chanteurs, bardes, troubadours, poètes, tous ceux qui ont sublimé dans leurs textes et chansons le plus beau des sentiments, qui nous transporte dans les élans les plus romanesques, l'ont fait en prenant invariablement les mêmes moments:
-celui de la découverte, de l'ivresse initiale de la passion, du transport amoureux dans toute sa vigueur, l'éclosion inéxorable de ce qui semble une évidence tant cela va de soi;
-celui de la perte, de la souffrance indescriptible dans laquelle nous plonge le départ, la trahison, la fuite, le décès de l'objet de notre attention, de notre affection... La fin du monde, en somme;
-enfin, celui de la nostalgie contemplative, où l'on regarde en arrière, où l'on songe aux beaux moments vécus, aux circonstances qui ont amené à la fin de ce beau rêve, un mélange d'amertume et de tendresse, un passé revu avec le recul nécessaire pour en apprécier la mémoire.

Il manque donc la plupart du temps, à mon humble avis, le moment sinon le plus important du moins le plus long lorsqu'on a la chance de vivre un amour de longue durée: l'entre deux. On se lance dans une relation en esperant qu'elle durera 30, 40, 50 ans, une vie, en somme. Certains en oublient que, cette vie, il faut la vivre; ce qui veut dire qu'en dehors de la passion indispensable (?), il faut aussi compter avec celui qui est considéré par les éternels romantiques comme le plus grand ennemi du couple: LE QUOTIDIEN!

Entre le moment où elle commence et celui où elle s'achève, il y a cette période plus ou moins longue selon les cas où on se connaît vraiment bien, où on e sent dans cette espèce de "comfort zone", mais où forcément, il y a moins de surprise. Puis, la vie suivant son cours, on vit ensemble, on dort et se réveille ensemble, on se lave ensemble, on déjeune ensemble, on part travailler ensemble, on rentre, on dîne ensemble, on prépare le lendemain de travail ensemble, on re dort ensemble, on se re-réveille ensemble...
Les phéromones jouant un rôle essentiel dans l'attraction sexuelle entre deux mammifères, le fait de baigner en permanence dans une maison remplie de celles de notre chère moitié est le meilleur moyen de s'y habituer, et ce faisant, de réduire considérablement le désir physique. C'est chimique, c'est scientifique, et Beigbeder a très bien résumé l'affaire en un aphorisme: "on ne peut désirer ce qu'on a, c'est contre Nature!"

Sur quoi baser alors ce dit rapport que l'on souhaite éternel, quand la flamme, sans s'éteindre complètement, n'est plus cet incendie sauvage et incontrôlable du début, où le moindre effleurement déclenchait un torrent de passion et une simple moue de la personne aimée nous procurait des frissons de la tête aux pieds? C'est bien beau de succomber à la passion, mais il ne faut pas négliger ce qui devrait être un des socles de la relation à deux, la capacité à communiquer, à partager des goûts et intérêts communs, à découvrir et faire découvrir de nouveaux horizons à l'autre, avec l'autre... Je pense que ce qui contribue à rendre le quotidien, les factures, les crédits pour la maison, la voiture, les études des enfants, les beaux parents, le stress du boulot, l'indisponibilité pour sa famille, les périodes de doute, les crises de la quarantaine, les insécurités dues aux cheveux blancs, au petit bide et aux poignées d'amour, bref, LA VIE DE TOUS LES JOURS à deux/ en famille, c'est le fait d'avoir une vision commune de ce que l'on souhaite accomplir ENSEMBLE. Ça, plus de la patience, de l'ouverture, de l'échange, de la complicité, de l'espace (!), ce sont des ingrédients nécessaires pour faire en sorte que le "lived happily ever after" ne soit pas une vaste blague... Mais il ne faut pas oublier la folie, la surprise, l'imprévisibilité, cette envie renouvelée de plaire à l'autre par mille moyens, de lui faire savoir en permanence qu'il occupe nos pensées, notre coeur. Voilà, à mon sens, la partition la plus difficile à réussir, le dosage le plus improbable à trouver, l'inconnue qui fait que... Parce que avec tous les arguments logiques avancés plus haut, comme dans une thèse, on pourrrait croire qu'il suffit de suivre la recette pour que tout un chacun vive un bonheur durable et sans faille avec sa chère moitié. Mais le facteur aléatoire, HUMAIN, est ce qui fait la beauté de nos rapports, ce qui fait qu'on peut réussir quelque chose qui a tout pour ne pas réussir et inversement. C'est tant qu'on garde en soi cette volonté inexplicable et inexpliquée d'avancer, de devenir meilleur, de rendre l'autre heureux, sans que ça semble un effort, et qu'on est capable de la renouveler lorsque la vie et la réalité reprennent leurs droits, qu'on peut se dire qu'on est amoureux. C'est tant qu'on accomplit sans effort ce qui peut sembler en être un que la survie de la relation est assurée, pour peu qu'on arrive à se faire comprendre et à le faire comprendre à l'autre moitié du couple...

Tout dans la vie est sujet à changement. Le bon choix pour aujourd'hui peut s'avérer un mauvais choix pour demain, alors il faut que nous vivions avec cela en tête; les sentiments d'aujourd'hui ne sont sûrement pas ceux de demain, la vie elle même peut se charger de séparer des gens qui se croient faits l'un pour l'autre. Rien n'est jamais acquis pour toujours. Mais il est possible de préserver, de garder, de chérir ce à quoi on tient le plus, et avec de la volonté de part et d'autre, un peu de recul pour analyser les situations de tension (moi le premier je sais que ce n'est pas toujours facile!), beaucoup d'écoute, de compréhension et surtout d'empathie, cette capacité de se mettre à la place de l'autre... En somme, pour moi, Aimer, c'est contredire AU QUOTIDIEN l'aphorisme de Beigbeder!

Nous sommes tous imparfaits, des êtres faillibles. Quand on décide de se mettre ensemble, on aditionne les imperfections, différentes selon les personnes, parfois incompatibles, souvent gérables avec de l'intelligence, de l'instinct, et de l'amour. Reste à définir ce que chacun d'entre nous appelle de l'Amour...

Sunday, March 29, 2009

Ma2MOI+ELLE


Mademoiselle, seras tu MA demoiselle?
paraît qu' j'suis mad, moi, d'elle!
toujours la même ritournelle...

Pas le temps de voir venir et j'suis sous le charme de la belle,
oubliés tous les soucis je n'ai plus d'yeux que pour celle
qui fait chavirer mon coeur et m'obscurcit la cervelle
Son parfum vaut bien tous ceux de la maison de Chanel,
Mélange de mer, de coco, saupoudré d'un peu d'canelle.
Son sourire est une vision, ses yeux éclairent mon ciel;
le seul son de sa voix me fait faire des trucs démentiels!
Pour elle j'irais à pied de Paris à la Moselle...

Je ne suis pas de ceux qui croient aux sentiments éternels
et l'usure du temps détruit même les histoires les plus belle
mais tant qu'le feu sera là, j'serais loyal et fidèle
on aura de beaux enfants, au moins une bonne ribambelle
j'leur enseignerais le ballon, t'enseigneras la marelle
je ne suis pas de ceux qui croient aux vœux dits dans une chapelle
pour te prouver mon amour j'ai beaucoup mieux que l'autel
un tourbillon de bonheur, de temps en temps une querelle
malgré tout, une certitude, pas de vie à deux sans elle!

Mademoiselle, seras tu MA demoiselle?
paraît qu' j'suis mad, moi, d'elle!
toujours la même ritournelle...

Wednesday, January 28, 2009

Slumdog on the Indian Express


"On s'est connus, on s'est reconnus,
On s'est perdus de vue, on s'est r'perdus d'vue
On s'est retrouvés, on s'est réchauffés,
Puis on s'est séparés.

Chacun pour soi est reparti.
Dans l'tourbillon de la vie
Je l'ai revue un soir, hàie, hàie, hàie
Ça fait déjà un fameux bail [2x]."

Le Tourbillon de la Vie, Jeanne Moreau


Hier soir j'ai Vu le film Slumdog Millionaire, de Danny Boyle. L'histoire incroyable d'un garçon issu d'un bidonville de Mumbai/ Bombay et qui s'apprête à gagner le gros lot dans l'émission "Qui Veut Gagner des Millions?"
Mais avant tout, l'histoire d'une vie, du tourbillon d'une vie. Jamal, jeune orphelin livré à lui même dès son jeune âge, accompagné dans ses péripéties par son frère aînée et l'amour de sa vie, Latika. La chanson de Jeanne Moreau retrace bien le chassé croisé qu'ont été les vies de ces deux jeunes héros, sans cesse séparés, sans cesse retrouvés... Je n'ai pas été insensible à la poésie de ce film; au rythme de flashbacks mouvementés, on retrace la vie d'un garçon le temps d'un interrogatoire, et le tout tourne autour de deux éléments récurrents: Latika et... le train.


Le Train? quel rappot avec le train? Bah oui, le train, les trains sont les lieux privilégiés de leur relation idyllique. C'est dans un train, alors qu'il a 7 ou 8 ans et y dort pour s'abriter de la pluie que Jamal voit Latika pour la première fois; c'est en fuyant Mamane, leur tortionnaire, qu'il monte dans le train et perd pour la première fois la trace de sa bien aimée... Ce train l'emmène vers de nouvelles aventures, mais jamais il n'oubliera celle qui a été sa compagne de misère, le rayon de soleil de sa sombre et brutale enfance, son troisième mousquetaire...

C'est donc logique que ce soit à la gare qu'il lui donne rendez vous pour un nouveau départ une fois qu'ils se retrouvent, adolescents. Ce rendez vous est mis à mal par toutes les forces contraires du destin, mais c'est cette même gare qui finira par les réunir...
Le regard de Jamal traverse des rames de train pour se fixer sur son aimée, pour qu'enfin leur destin s'accomplisse. Ce film raconte une vie, un destin, de façon fulgurante, sans temps morts, on a droit aux paysages, aux odeurs, aux sons qui titillent notre imaginaire quand il s'agit de l'Inde... on le traverse comme on prend le train, et on n'est pas déçus au final, car peu importe la destination, le voyage est exquis et vaut le détour... de quoi me donner envie de prendre le train en cette veille de grève générale de la fonction publique en France! Heureux qui comme Jamal a fait un beau voyage...

Monday, December 08, 2008

I AM HIP HOP! (en alexandrins)


Je suis pti' fils d'esclaves et je chante ma peine;
je suis chant de douleur devenu cri de haine;
je suis l'espoir qui naît d'un torrent d'amertume;
je suis une rose éclose au milieu du bitume;
je suis fils de la soul, du funk, du rock, du jazz;
je suis universel, j'ai des millions de blazes;
je suis né dans le Bronx, j'ai grandi dans son flanc,
puis j'ai pris manhattan, traversé l'océan,
j'ai muté, voyagé et envahit le monde,
pas un gosse qui m'ignore tant ma sève est féconde,
je transporte le rêve partout dans mes bagages
et je change de peau à chaque nouveau rivage;
je suis plus qu'une parole, suis un mode de vie,
culture à part entière, une vraie philosophie
j'tague partout mon nom dans les rues de vos villes
et j'invente des mots pour décrire tous mes maux;
je vis avec eux tous la plus belle des idylles
puis m'impose, surnois, au fond de vos cerveaux!
j'apaise ma colère en volant de mes pieds
que ce soit en freestyle ou figure imposée
mon deejay aux platines recycle le temps,
par le sample il ravive les refrains d'antan;
je suis festif ou grave, c'est selon le moment,
le style ou le MC qui déverse son torrent;
je suis fier d'être né pour reprendre le flambeau
j'ai 30 ans, j'suis le hip hop, suis encore nouveau,
mais suis là pour rester alors gare à mon flow!

Le Hip Hop a été reconnu pratique culturelle la plus répandue sur la planète par l'UNESCO en 2006. c'est un phénomène culturel à part entière regroupant des gens de tous ages, origines et horizons, avec un même amour pour les codes, les références, les mots... il y a plusieurs variantes et styles au sein même des différentes disciplines qui composent cette culture (le rap, le tag, le deejaying, le beat box et la danse), et ils rassemblent des millions de personnes dans le monde sous une même banière. je suis pour un message de tolérance et de paix dans le hip hop, car c'est un héritage culturel qui doit être transmis sous sa meilleure forme possible. I LOVE HIP HOP. I AM HIP HOP. LONG LIVE HIP HOP!
(en photo: DJ Kool Herc, le fondateur du hip hop)

Tuesday, November 25, 2008

cupid's hangover part I

Je ne sais pas d’où vient la croyance populaire selon laquelle cupidon est un chérubin ailé qui se promène tout nu et décoche des flèches d’amour à tout va… simplement ridicule ! Je crois qu’on est victimes d’une imagerie judéo-chrétienne qui voudrait nous voir comme des anges ou quelque chose approchant, des êtres asexués et dévoués au service de l’humanité. Dévoués, nous l’avons été tant que nous y avons cru, et ça n’a pas dû durer plus que quelques centaines d’années.

Mais pardon, où sont mes manières, j’ai complètement oublié de me présenter ! Je suis R., un tiers de cet être mythologique que les humains appellent cupidon. Oui, je sais, je ne ressemble pas vraiment à ce que vous aviez en tête, je suis un être d’apparence adulte (d’apparence seulement, puisque malgré mes 7000 et quelques années sur cette terre – ou peut être à cause d’elles, justement – il paraît que j’ai un comportement d’adolescent attardé), je n’ai pas l’air angélique pour un sou – et pour cause, je ne suis pas un ange, pour la millième fois ! – et pour couronner le tout, je suis Noir ! Mes deux autres acolytes ne cessent de me faire des blagues au goût douteux là-dessus, disant que c’est normal que l’amour parte en couille sur terre, puisque le responsable d’un tiers des relations amoureuses est Noir, et ça se saurait si les Noirs étaient capables d’autre chose que de danser, baiser ou faire du sport ! Or il se trouve que moi, bizarrement, je ne suis doué pour aucun des trois… Ironie du sort et du Créateur, qui ne manque pas d’humour.

J’ai donc l’apparence humaine, ainsi que mes deux « associés », A. et C., les deux autres tiers de cette identité complexe et que je ne sais pas pour quelle raison on nous demande de garder secrète. C’est vrai que si on révélait nos vraies natures à tous les amoureux de cette planète, la Saint Valentin deviendrait une fête aussi joyeuse que la Toussaint ! Comment « marketer » une fête censée célébrer l’amour avec comme fer de lance trois alcooliques pervers et bagarreurs, qui passent plus de temps à essayer d’exorciser leurs démons qu’à accomplir leur mission ? Je sais, ça ne donne pas envie de croire en l’amour, mais ça n’a pas toujours été comme ça… On y a cru, un jour, comme vous, et dans le fond, nous souffrons encore de cela, et ce pour une durée indéterminée. Avec ces conneries d’amour, nous on a pris perpète, pour vous la souffrance s’achève le jour de votre mort. A la bonne heure !

Au début nous accomplissions notre mission avec sérieux et application, et nous réjouissions sincèrement de chaque couple que nous arrivions à rassembler. Aujourd’hui, non seulement ces enfoirés d’humains sont devenus presque aussi blasés que nous (et de plus en plus tôt ! On en a trouvé qui à 20 ans parlaient comme de vieux chevronnés, et avaient à peu près le vécu correspondant), mais ils sont aussi de moins en moins patients les uns avec les autres. À croire que plus ils vivent longtemps moins ils semblent disposés à se supporter « jusqu’à ce que la mort les sépare » ! Eh, oui, l’espérance de vie de 35 ans au moyen âge permettait plus facilement de croire à l’amour éternel, alors qu’aujourd’hui, il faut attendre 35 ans pour que bobonne crève ! Du coup, nous aussi on s’en fout, et aussitôt un nouveau couple constitué, nous ouvrons les paris sur la durée la plus probable de la mascarade. Je suis assez souvent gagnant à ce petit jeu là, mais faut dire que je ne prends pas beaucoup de risques, je vise jamais plus que les 3 ans… et j’ai souvent raison ! Qu’est-ce que j’ai pu les plumer, les deux autres cruches... Mais en même temps, vu mon niveau au poker, ils récupèrent assez rapidement leur mise, donc c’est de bonne guerre !

Mon acolyte A. est aussi du sexe masculin (je l’ai dit, nous sommes loin d’être asexués, et avons même une libido assez déjantée, tous les trois), a à peu près le même âge que moi (7000 et des brouettes, environ 30 à vos yeux), est du genre grand brun ténébreux au regard perçant, pouvant la seconde d’après se transformer en loufoque plaisantin, jouant les tours les plus cruels et improbables à quiconque se retrouvera sur son radar à cet instant là. Un savant mélange de Jake Gylenhaal dans « Brokeback Mountain » pour le côté « silence parlant » pseudo sexy, et de Looping de « l’Agence tous risques » pour l’humour potache. Le tout saupoudré de la douceur et la délicatesse d’un marquis de Sade (qui était au demeurant un fort charmant personnage, avec qui nous avons maintes fois eu l’occasion de philosopher).

Quant à C. c’est la fille du groupe. Un peu plus jeune, à peine 5500 ans – 26 à vos yeux – blonde, jolie, rigolote mais terriblement dangereuse pour la gente masculine… La réputation attribuée aux blondes ne saurait en aucun cas s’appliquer à elle, tant elle joue bien de ses charmes sans jamais se laisser devenir la proie des prédateurs égocentriques et un peu bêtes que sont les mâles de l’espèce humaine. C. est notre caution, notre sésame pour endormir la vigilance de nos propres victimes, et elle adore jouer ce rôle là ! Les hommes se font avoir par ses hauts dos nus, les femmes par son air complice (alors même qu’elle les aide à creuser leur propre tombe, si j’ose m’exprimer ainsi), et au final, elle obtient ce qu’elle veut de tout le monde : des verres au bar des uns, de la confiance et une baisse de vigilance (qui nous profite à A. et à moi) des autres. Je crois qu’on appelle ça le travail d’équipe …

Les questions qui vous tarabustent en ce moment précis doivent être nombreuses : comment de tels êtres au comportement aussi abject peuvent être les garants de l’amour sur terre ? Que sont-ils s’ils ne sont pas humains ? S’ils ont une vie sexuelle et/ou amoureuse, où trouvent-ils le temps de s’occuper de nos amours à nous ? Si vous vous posez ces questions, vous avez bien raison, et je vais essayer d’y répondre du mieux que je pourrai.

Nous avons apparence humaine pour la simple et bonne raison que nous avons été humains, avant de recevoir la bénédiction ( ?) de la vie éternelle de la part du Créateur. Ça s’est passé au moment où il a remarqué une baisse de natalité chez les humains. Ils (vous, donc) avaient, après des milliers d’années d’évolution, atteint un stade que l’on peut considérer comme étant proche de l’actuel, l’étape de l’homo sapiens. Une fois le cerveau passé à des fonctions plus complexes, une fois développée la capacité de créer des objets inutiles à la survie de l’espèce, l’homme s’est entouré d’un confort qui lui a fait baisser la garde et se désintéresser peu à peu de la bagatelle, trop occupé qu’il était à profiter de son esprit bien supérieur à celui des animaux. Il a donc cessé de solliciter sa femelle plus que le nécessaire pour la reproduction, et encore !

Très vite, malgré sa supériorité intellectuelle, la race humaine s’est retrouvée en danger d’extinction. Il a fallu au Créateur trouver un moyen faire que l’homme s’intéresse à nouveau à sa femelle et inversement, de façon à relancer la croissance démographique de cette espèce qu’Il avait élu comme étant sa favorite, et qui devait régner sur les autres… il a bien compris avec les dinosaures que c’était n’importe quoi, qu’il fallait que la terre soit régie par des êtres capables de la transformer, pas des grosses bébêtes écraseuses d’arbres. Mais à quoi cela lui aurait-il servi d’effacer les gros lézards de la terre et les remplacer par les Hommes si ceux-ci, dès qu’ils se sont crus malins, se sont eux-mêmes mis en danger ? Il a donc fallu faire appel à cet instinct de survie de l’espèce que l’intelligence (le plus grand cadeau empoisonné qui soit) avait failli effacer. Il a décidé de choisir des êtres à part, qui auraient comme seule mission faire naître et perpétuer dans les cœurs des humains ce besoin de l’autre, ce lien indéfinissable et incompréhensible qu’on appelle l’Amour. Oh, bien sûr, il a utilisé aussi la formule chimique des humains pour ça, un mélange compliqué d’hormones et autres conneries, comme pour tous les animaux, mais quand celle-ci s’est révélée insuffisante, nous sommes rentrés en jeu.

Nous étions une véritable armée, des centaines de missionnaires de l’Amour dont le boulot consistait à faire croire aux humains qu’ils avaient un besoin impérieux de s’aimer pour exister. Au début, les premiers cupidons étaient de simples mortels à qui Il avait donné les dons de persuasion, de poésie, et ils devaient, par leurs créations artistiques, littéraires, musicales etc., donner un exemple à suivre en matière de comportement amoureux. Cette forme de cupidons existe toujours, ce sont des êtres dits « touchés par la grâce », les poètes musiciens et autres saltimbanques qui dégoulinent tellement de bons sentiments qu’ils ne peuvent faire autrement que de les partager avec la terre entière. Pour plus de sécurité pour eux-mêmes et pour les humains, ils n’ont plus conscience de leur mission, elle est inscrite quelque part dans leur inconscient. Donc, quand on parle de don pour la poésie, pour la musique, etc., on est on ne peut plus près de la vérité !

L’autre type de cupidons, celui dont je fais partie, a au contraire reçu la vie éternelle. Nous avons comme mission non pas arranger des couples au cas par cas (trop long et fastidieux, en plus on est incapables d’assurer un SAV digne de ce nom à trois) mais de créer des dynamiques amoureuses partout où on passe, d’inspirer les poètes en panne, d’insuffler le virus de l’amour chez les récalcitrants de façon à ce que leur transformation devienne un exemple à suivre pour les déçus et les sceptiques ! Nous n’avons été que quelques uns à avoir ce privilège au cours des millénaires, et aujourd’hui il n’en reste plus que trois, tous les autres ayant renoncé volontairement à leur immortalité pour vivre leurs amours au grand jour avec des mortels.

Les critères du Créateur pour choisir ses cupidons étaient on ne peut plus strictes : il fallait une droiture morale à toute épreuve, il fallait avoir aimé sincèrement au moins une fois dans sa vie, et avoir été responsable du bonheur d’un être aimé sur terre. Comme quoi, rien de mieux que l’amour pour nous guérir de l’amour… Aujourd’hui, même Lui a renoncé à « former » de nouveaux cupidons, tellement la tâche est devenue ardue et ses critères absolument incompatibles avec les modes de vie adoptés par les humains depuis des siècles. Du coup, il se retrouve coincé avec nous trois, blasés au possible, mais derniers témoins d’une époque révolue où l’Amour tel qu’Il l’a voulu sur terre a vraiment existé. Et étant données les expériences de nos collègues qui ont renoncé à l’immortalité pour vivre leur amour et se sont plantés au final, aucun de nous trois n’est prêt à un tel sacrifice. Puis, il faut l’admettre, l’amour, on n’y croit plus, mais les humains sont quand même vachement drôles quand ils font semblant d’y croire ! Alors, faute de mieux, on s’en amuse, on en profite (on aurait tort de s’en priver, non ?) en attendant… en attendant quoi ? Je ne sais même pas ce qu’on attend. L’éternité, ça finit quand, à peu près ? Jamais ? C’est bien ce que je me disais !